L’homme est Robinson

L’homme est curieux et ne peut s’empêcher d’explorer les moindres recoins de sa planète. Il a vaincu les hauts sommets comme des adversaires, les abysses sont en sursis. Sa soif de connaissance l’a même arraché à la terre pour courir l’infini, à moins que ce ne soit la fièvre de posséder.

Je me suis trouvée bien perplexe devant la bibliothèque de mon père, Jean Papillon, infatigable collectionneur de robinsonnades.

Robinsonnades : contes idylliques et utopiques qui situent l’action dans un cadre exotique à la manière de Robinson Crusoé.

Celui qui n’a de cesse de tout connaître semble se ravir à coincer un héros sur une île, planète, vaisseau… Comme un poisson dans un bocal. Il réduit son monde et l’oblige alors à s’ausculter lui-même et analyser l’infini de l’esprit humain. L’écrivain s’imagine alors en dieu de l’Olympe. Certains comme le héros de Daniel Defoe tente de se maintenir dans une civilisation, des petits groupes de mutinés rêvent à une autre société, d’autres encore retrouvent la simplicité de la nature.

L’homme est un Robinson.

De Robinson Crusoé aux héros de Lost en passant par L’île mystérieuse, l’exercice de la solitude est un jeu auquel l’homme aime se soumettre. Depuis son enfance, il s’exerce à la survie, dans sa chambre, dans l’école… Chaque étape de la vie est une île.

Quand nous avons décidé d’avoir une maison à la campagne, je ne saurais dire si c’est un désir de découverte ou l’envie de s’isoler qui nous a guidé. Il me semble plus aisé d’explorer notre petit terrain que de partir au bout du monde et comme la famille des Robinson Suisses d’installer une cabane merveilleuse. Il n’y a pas là de misanthropie, mais l’envie de garder ses caractéristiques propres, de ne pas être confondu avec un autre, être un dans un tout. Cette volonté d’originalité ne ferme pas la porte aux autres et notre petite île familiale possède de nombreux ports et anses où l’autre peut accoster.

Pour ceux qui ont la chance de partir en vacance, la mode serait d’être des Robinson volontaires. Ils choisissent une île comme une roulotte, une tente, une yourte ou une cabane dans les arbres et acceptent les règles du jeu : vivre chichement, aménager avec les moyens du bord, sans électricité ou eau ou être volontaires pour vider les toilettes sèches. Sommes-nous des bobos en mal d’authenticité ou souhaitons-nous réellement freiner notre style de vie, alertés par les hoquets de notre planète ? Il est sûr que nous culpabilisons régulièrement et que nous avons même parfois la nausée devant nos consommations compulsives. Nous nous inquiétons pour l’avenir de nos enfants et ces maigres efforts doivent être exemplaires. Beaucoup d’entre nous montre l’exemple et apporte leur pierre à l’édifice par la récupération, le recyclage, la consommation de proximité et le partage. Une émission comme celle de Philippe Bertrand sur France inter « carnet de campagne » est réjouissante et génère de l’espoir. Elle nous montre une France active, solidaire mais trop peu exposée.

Nous n’avons pas choisi notre maison de campagne, nous l’avons récupérée par héritage. C’est une vieille valise pleine de souvenirs que nous rafistolons avec des bouts de ficelle pour continuer notre chemin. Les enfants sont du voyage et ne se privent pas de charger le paquet. Nous sommes les Robinson des campagnes !

Nous essayons de faire des choses par nous-même par souci d’économie, mais c’est avec plaisir que nous cédons la place aux artisans du coin quand le travail est trop spécialisé.

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